Forfait-jours
Comment résister
Pour mettre en place des forfaits-jours, l’employeur doit nécessairement conclure un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche (voir Code du travail, article L. 3121-63). Les salariés et les représentants du personnel peuvent peser sur cet accord, même si, depuis la loi Travail, l’employeur dispose de multiples possibilités pour parvenir à la conclusion d’un accord.
- S’opposer fermement à l’accord. Chaque salarié peut demander aux organisations syndicales présentes dans son entreprise de ne pas valider l’accord instituant ou révisant les forfaits-jours.
- Attention, ce n’est pas parce que les organisations syndicales majoritaires sont opposées à l’accord sur les forfaits-jours que celui-ci ne pourra pas s’appliquer ! En effet, la loi travail a créé un référendum d’entreprise, qui permet à des organisations syndicales minoritaires ayant recueilli 30 % des suffrages aux élections professionnelles dans l’entreprise de signer l’accord et de demander la tenue d’un référendum pour le valider ! Comme l’organisation du référendum et de la question posée sont laissés aux mains de l’employeur et des organisations minoritaires, on peut s’attendre au pire !
- Au cas où un référendum serait organisé, il est essentiel que les salariés de l’entreprise soient pleinement informés des enjeux et conséquences de l’accord, par l’ensemble des organisations syndicales représentatives présentes dans l’entreprise et pas uniquement par celles qui veulent faire passer l’accord.
- Négocier sans compromission. Lors de la négociation de l’accord sur les forfaits-jours, les représentants du personnel doivent exiger au minimum le respect des durées de travail raisonnables de 9 heures par jour et 40 heures par semaine, et en tous cas nettement inférieur aux 13 heures par jour et aux 78 heures par semaine. Ils doivent également exiger des compensations pécuniaires en rapport avec le temps de travail effectué.
- Lors de la négociation il peut être utile de s’appuyer sur les constats des représentants du personnel, enquêtes syndicales ou rapports d’expertise concernant la charge de travail excessive des salariés, les risques pour leur santé, etc.
- Aller au contentieux. De nombreuses conventions de forfait-jours sont susceptibles d’être annulées pour non-conformité au droit international, notamment aux articles 2§1 et 4§2 de la Charte sociale européenne. Les salariés qui saisissent les prud’hommes sur ce point pourraient ainsi obtenir le paiement de toutes les heures effectuées au-delà de 35 heures par semaine, ainsi que les majorations pour les heures supplémentaires correspondantes.
- La CGT et la CFE-CGC ont déposé un recours commun contre les forfaits-jours dans leur version issue de la loi Travail devant le Comité européen des droits sociaux (CEDS), la juridiction du Conseil de l’Europe chargée de contrôler le respect de la Charte sociale européenne.
- Le forfait-jours doit être réservé aux salariés ayant une réelle autonomie, ceux qui disposent d’une liberté effective pour l’organisation de leur travail. Les accords collectifs encadrant le forfait-jours doivent décrire précisément les catégories de salariés éligibles et les éléments d’autonomie justifiant le recours aux forfaits en jours. De plus, le salarié doit être volontaire et pouvoir mettre fin à la convention de forfait-jours à tout moment.
- Le temps de travail des salariés en forfait-jours doit être encadré afin de permettre au salarié de maîtriser son temps de travail et de préserver sa vie personnelle et familiale. Pour cela, il est nécessaire de réintroduire une référence horaire, avec des modalités adaptées à un travail autonome. La mesure individuelle du temps de travail serait alors effectuée sur la base d’un système déclaratif sans surveillance excessive de l’employeur. Et le suivi collectif des charges de travail incomberait à l’employeur sous le contrôle des représentants du personnel.
- La totalité du travail accompli doit être rémunéré. Pour ce faire, la convention individuelle de forfait doit fixer l’horaire hebdomadaire moyen de référence correspondant à la rémunération du salarié. Le dépassement de cet horaire sur une certaine durée donne lieu à une majoration de salaire ou à une compensation en repos supplémentaire. Par ailleurs, lors de la signature d’une première convention de forfait en jours par un salarié non forfaitisé, la rémunération forfaitaire prévue par la convention ne peut être inférieure à celle que toucherait le salarié s’il travaillait selon l’horaire de référence, les heures supplémentaires étant évaluées comme pour tous les salariés donc majoration incluse.
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